#13 - Pourquoi l’égalité salariale ne suffit pas ?
Égalité, équité, parité, rôles sociaux : comprendre les nuances d'un monde professionnel plus juste.
Bienvenue dans cette nouvelle édition de La Golden Hour !
Ici on creuse, on éclaire et on combat les inégalités financières hommes-femmes, notamment au travail ! De temps à autre, on y parle aussi transformations du travail, engagement et quête de sens : un cocktail à siroter chaque mois sans modération.
It’s your time to shine ☀️
Bonne lecture !
Quand je dis que j’explore le sujet des inégalités hommes-femmes au travail, on me répond quasi systématiquement “Ah, l’égalité salariale !”. C’est vrai, le fameux “à travail égal, salaire égal” est un principe important qui a été pionnier dans le chemin vers l’égalité, mais qui est loin de se suffire à lui-même !
En réalité, il faut aussi parler de deux autres concepts essentiels : l’équité et la parité.
Grosso modo :
L’égalité c’est donner à tout le monde la même chaussure sans distinctions et donc de la même pointure. C’est “égal certes”, mais ça marche pour certains et pas pour d’autres.
L’équité c’est donner la même chaussure en ajustant la pointure en fonction de la taille de pied de chacun, pour que tout le monde puisse marcher confortablement.
La parité c’est s’assurer que parmi les chaussures qu’on a en stock, avec autant de paires pour chaque pointure.
Ces trois notions, combinées, sont indispensables pour lutter contre un adversaire redoutable : les rôles sociaux ! Ces normes arbitraires qui définissent à l’avance qui doit porter quelle chaussure, de quelle taille et en quelle quantité, selon un critère non pertinent, ici : le genre.
Dans cette lutte, la France est plutôt bien située sur l’égalité salariale mais reste loin derrière le modèle québécois en matière d’équité. Quant à la parité, des efforts ont été faits avec la loi Copé-Zimmermann, mais son application est bien moins retentissante que prévu.
C’est tout cela que l’on décortique aujourd’hui 🧐
Égalité salariale : un grand pas, mais pas suffisant
Il y a deux semaines, je vous parlais du principe "à travail égal, salaire égal", inscrit dans le Code du Travail depuis 1972 (avant ça, il existait même ce qu’on appelait un "salaire féminin" !).
Ce principe signifie qu’un homme et une femme, qui font exactement le même travail, avec le même temps de travail, dans une même entreprise, doivent être payés pareil.
Aujourd'hui, bonne nouvelle : dans ces conditions, l'écart salarial n'est plus "que" de 4,3 %. On pourrait presque crier : "Youpi, c’est réglé !". Mais… pas si vite !
Quand on élargit un peu le regard, en comparant les salaires hommes-femmes à temps de travail égal, mais tous métiers confondus, les femmes gagnent encore 15,5 % de moins que les hommes. C’est énorme !
Comment ça se fait ?
C’est parce que ce principe d’égalité ne s’applique qu’au sein d’une même entreprise ou à sur un même métier précis. Or, le marché du travail dans son ensemble est toujours marqué par des inégalités structurelles.
Prenons l’exemple des métiers care, comme infirmières ou aides-soignantes. Ces métiers sont principalement occupés par des femmes, sont essentiels pour la société, mais souvent moins bien payés que des métiers majoritairement masculins, parfois moins exigeants.
C’est là que l’équité salariale entre en jeu ! L’équité vise à rémunérer les gens de manière plus juste, en tenant compte non seulement du travail qu’ils font, mais aussi de sa réelle valeur pour la société. Elle prend en compte la charge de travail, les compétences, et l’impact du métier.
C’est ce constat qui a poussé le Québec, à la fin des années 90, à adopter une loi sur l’équité salariale.
L’équité salariale : vers une valorisation plus juste (le modèle québécois)
En 1995, les québécois découvrent dans une émission de télévision le salaire d’un gardien de zoo (métier à prédominance masculine). En comparant ce salaire à celui des éducatrices en garderie (métier à prédominance féminine), on constate une différence de 365€ par mois !
Si les gardiens de zoo sont mieux payés, c’est qu’on accorde, d’une certaine manière, plus d’importance à la surveillance des animaux qu’à l’éducation de nos enfants. Cette découverte a déclenché une vague qui a débouchée, un an plus tard, à la loi sur l’équité salariale.
En ce sens, le Québec fait figure de pionnier. Concrètement, la création d’un système de notation des métiers est mis en place pour évaluer la valeur des différents métiers. Parmi les critères : le niveau d’autonomie dans le travail, la liberté d’appliquer des méthodes ou de suivre des protocoles, la pénibilité qu’elle soit physique, mentale, ou liée aux horaires,… L’ensemble des réponses débouche sur une note, et plus cette note est élevée, plus le métier apporte de la valeur/est pénible, et plus le salaire est à revaloriser à la hausse.
Résultat : des métiers féminisés, comme celui d'infirmière, ont vu leur salaire nettement augmenter par rapport à d’autres ! Et au lieu de réduire les salaires des uns, le gouvernement a décidé d’augmenter les rémunérations des métiers jugés sous-payés.
Ce qui est intéressant, c’est qu’à la différence de la réforme des retraites en France en 2011 (où les infirmières ont dû renoncer au critère de pénibilité en échange d'une hausse de salaire), aucune contrepartie n’a été demandée aux infirmières au Québec. Pour financer leur hausses, la ministre du budget de l’époque, Monique Jérôme-Forget, a négocié avec les syndicats un gel des salaires des fonctionnaires pendant deux ans.
Cette démarche, évoquée dans une édition de Cash Investigation sur France TV, a permis d'augmenter significativement les salaires dans les métiers sous-valorisés, et ce aussi bien pour les femmes que pour les hommes !
Un très bel exemple d’équité salariale.
Parité : c’est pas juste compter les chaises, c’est aussi les occuper !
Un autre levier essentiel dans la lutte contre les inégalités est la parité.
Il ne s’agit pas seulement d’assurer la mixité, mais de garantir que chaque sexe ait une place équitable dans les instances décisionnelles et dans tous les secteurs d’emploi.
La mixité est un premier pas : elle permet aux femmes d’accéder à des domaines où elles étaient traditionnellement sous-représentées, comme l’ingénierie, la tech ou encore les sciences. Cependant, il ne suffit pas simplement de “laisser entrer” les femmes dans ces milieux. Si elles restent une minorité isolée, au milieu de salles de réunions dominées par des hommes, peut-on vraiment parler de progrès ?
La parité, elle, va beaucoup plus loin. Son objectif est d’atteindre un véritable équilibre de représentativité entre les hommes et les femmes, pas seulement dans les chiffres, mais aussi dans les opportunités, les responsabilités et l’accès aux postes stratégiques. Comme dit dans le titre : ce n’est pas juste compter les chaises, c’est aussi les occuper !
À ce sujet, on notera que malgré son ambition, la loi Copé-Zimmermann (qui impose 40 % de femmes dans les quotas de conseils d’administrations) reste largement sous-exploitée. Le problème ? Personne au gouvernement n’a été désigné pour vérifier son application en entreprise. Faute de contrôle, les sanctions prévues contre les entreprises qui ne respectent pas les quotas n’ont jamais été mises en œuvre, et les entreprises ont la liberté d’en faire (ou non) leur priorité.
Mais soyons honnêtes, la parité ne peut pas simplement être imposée par la loi. Pour qu’elle devienne une réalité, elle doit s’ancrer profondément dans la culture des entreprises. Cela signifie repenser les processus de recrutement, de promotion et d’évaluation pour éliminer les biais de genre. Ce n’est pas juste une question de remplir des quotas ou d’atteindre un pourcentage. Il s'agit d’instaurer un véritable changement de mentalité au sein des organisations.
Vers un modèle pour plus de justice
Pour vraiment atteindre une société juste, il est essentiel de combiner ces trois notions : égalité salariale, équité salariale et parité. Parce qu’au fond, il ne s’agit pas seulement de donner à chacun les mêmes chaussures, mais de s’assurer que chacun ait une paire qui lui convienne vraiment.
Cela dit, même ces trois concepts réunis, on ne peut résoudre le problème dans son intégralité. Les normes qui régissent les rôles sociaux influencent encore lourdement les carrières des femmes ! Il est crucial d’accompagner ces changements par une réflexion sur la répartition des tâches domestiques et une meilleure prise en compte des obligations familiales dans les entreprises.
Sources :
Égalité hommes femmes : balance ton salaire, par Cash Investigation
https://comp-on.ch/fr/egalite-salariale-nest-pas-synonyme-dequite-salariale/
https://www.monentrepriseinclusive.com/egalite-parite-equite/
https://inegalites.fr/femmes-hommes-salaires-inegalites
News
Une édition que j’ai rédigé pour vous lors de mes 6h de trains pour un aller-retour de 24h à Paris. Et oui, depuis la rentrée, les événements ne font que de s’enchaîner, et ma mini valise a enfin repris de son service ! Pour organiser une projection, une conférence ou une table-ronde : écrivez-moi ☺️
D’ailleurs, il y a une semaine jour pour jour, j’animais une table-ronde au croisement de trois sujets (femme, argent, âge) aux côtés des hôtes du podcast Vieille en Puissance. La conversation a été guidée par la question suivante : pourquoi les inégalités hommes-femmes se creusent avec l’âge ? Et c’était passionnant !
En parallèle, la saison automnale reprend son cours, et les premiers sommets enneigés pointent le bout de leur nez. L’avantage de Grenoble, c’est qu’on n’a pas le temps de s’ennuyer et ce qu’importe la saison ! Après les activités nautiques, la saison du snow (ou du ski selon préférence) va bientôt reprendre !
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